La situation sécuritaire dans l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) continue de se détériorer, exacerbée par l’échec du processus de paix mené à Luanda et les avancées inquiétantes du groupe rebelle M23. Dans un contexte où les tensions avec le Rwanda s’intensifient, le gouvernement congolais, par la voix de son ministre d’État en charge des Affaires étrangères, a annoncé son intention de multiplier les pressions diplomatiques pour trouver une issue à cette crise persistante.

L’occupation stratégique de Matembe et Alimbongo

Dans la soirée du dimanche 15 décembre 2024, les rebelles du M23 ont occupé la localité stratégique de Matembe, située à 60 kilomètres du centre de Lubero, une ville clé dans la province du Nord-Kivu. Le lendemain, lundi 16 décembre, les rebelles ont étendu leur contrôle jusqu’à Alimbongo, à 50 kilomètres de Lubero. Ces deux localités se trouvent sur la route stratégique qui mène à Butembo et Beni, des villes majeures dans le Grand Nord, ce qui confère à ces avancées une importance capitale dans la progression du M23.

Une réponse diplomatique face à une impasse militaire

L’échec des accords de Luanda, qui visaient à désamorcer les tensions entre Kinshasa et Kigali, a poussé le gouvernement congolais à privilégier une offensive diplomatique pour dénoncer l’implication du Rwanda. Cette stratégie entend exposer le rôle joué par Kigali dans la déstabilisation du Nord-Kivu et ce, depuis des décennies.

« Nous allons intensifier notre présence sur la scène diplomatique afin que la communauté internationale prenne ses responsabilités face à cette agression« , a déclaré la Ministre des Affaires étrangères, Thérèse Kayikwamba, soulignant la détermination de Kinshasa à isoler le Rwanda sur le plan international.

Un terrain complexe et un front fragmenté

Sur le terrain, la situation reste critique. Les forces régulières des FARDC, épaulées par les Wazalendo (groupes d’autodéfense), les troupes de la SADC (Communauté de développement d’Afrique australe) et des mercenaires, peinent à contenir l’avancée du M23. Malgré ces renforts, la dynamique militaire semble toujours favorable aux rebelles, mieux aux terroristes, qui continuent d’occuper des positions stratégiques.

Les enjeux de la pression diplomatique

Face à une guerre qui s’intensifie, Kinshasa mise sur la diplomatie pour :

1. Interpeller l’Union Africaine (UA) et la pousser à jouer un rôle plus actif dans la résolution de la crise.

2. Exhorter les Nations Unies à renforcer les sanctions contre le Rwanda et ses alliés présumés.

3. Engager des discussions bilatérales avec des acteurs clés comme l’Angola, médiateur historique, et des puissances internationales comme les États-Unis et l’Union Européenne.

Cependant, si cette stratégie diplomatique s’intensifie, elle reste pour l’instant sans impact direct sur le terrain, où les affrontements se poursuivent au détriment des populations civiles.

Une crise humanitaire en plein essor

Les avancées du M23 ont entraîné un nouvel afflux massif de déplacés vers Lubero, Butembo et d’autres localités du Nord-Kivu déjà saturées. La situation humanitaire est alarmante, avec des milliers de familles fuyant les combats et manquant de nourriture, d’eau et de soins médicaux.

Une stratégie diplomatique sous pression?

En renforçant sa pression diplomatique, le gouvernement congolais cherche à replacer la crise dans l’Est au cœur des préoccupations internationales. Toutefois, face à un front militaire fragmenté et à une coalition disparate sur le terrain, Kinshasa doit composer avec une réalité complexe.

L’absence d’une force régionale unifiée et l’échec des initiatives précédentes soulignent l’urgence pour la communauté internationale de proposer une solution crédible. Sans action rapide, le conflit risque de s’enliser davantage, avec des conséquences dramatiques pour la population et la stabilité régionale.

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Philippe KAZADI O.

Kiosque d'Afrique