Enlever les enleveurs. Kidnapper les kidnappeurs. Faire enfin peur à ceux qui prennent un vilain plaisir à faire peur à la ville entière. Terroriser les terroristes qui sèment la terreur dans toute la capitale. Kin la belle ou la poubelle- c’est selon – virant en « Kin la peur ».

Pas l’once d’un jeu de mots. Pas l’ombre d’un calembour qui, on le sait, rime avec humour. On ne peut rire de tout. Comment divertir sans avertir lorsque la ville souffre le martyr.

Double peine pour le Kinois ? Cela y ressemble. Ventre affamé, il doit en plus vivre la peur au ventre ! Un cauchemar de plus ou carrément de trop pour un peuple qui en a déjà marre de cauchemarder.

D’où le début de » ouf de soulagement » poussé en chœur et par cœur par les plus 10 millions d’âmes qui peuplent cette mégapole située au cœur du Continent à la faveur de la traque des kidnappeurs et kidnappeuses. Cette opération vaut bien l’accentuation des embouteillages et autres bouchons proverbiaux sur les artères de Kinshasa. La mise hors d’état de nuire de ces enleveurs vaut bien la kyrielle d’interpellations et d’arrestations.

Comme quoi, répression, arrestation et même perquisition cessent d’être de vilains mots lorsqu’ils servent l’intérêt général. Surtout si elles permettent in fine de mettre la main sur la main noire ! Broyant du noir à longueur de journée, le Kinois lambda n’est pas près de voir cette série noire se poursuivre. D’où le chèque en blanc donné aux forces de sécurité pour blanchir la ville.

Pourvu, toutefois, que la nécessaire répression en cours ne tourne pas à une énième régression. Comme pour les tristement célèbres » kulunas « – avec manchette ou en cravate- qui font non un aller simple vers la prison, mais des va- et -viens, » kwenda-vutuka » en jargon kinois. De sorte que sur le front du banditisme ou de la criminalité urbaine, les habitants de grandes agglomérations comme Kinshasa, Lubumbashi … assistent, bien malgré eux, au mieux à l’application du principe de Lavoisier. A savoir, rien se perd, rien se crée, tout se transforme et au pire à la problématique de l’éternel recommencement tel que développé dans « Le mythe de Sisyphe » d’Albert Camus.

Et si on kidnappait d’abord l’impunité? On kidnapperait alors vraiment les kidnappeurs. Le bouclage en cours permettrait de boucler la boucle.

José NAWEJ